Expérience africaine

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Le Spleen et l'Idéal - 16/10/08

N'ayez crainte, je n'ai aucune intention de disserter sur l'œuvre de notre ami Baudelaire ! Juste une envie de donner des nouvelles de la petite famille à tous ceux que j'ai délaissés depuis la rentrée scolaire, faute de temps. Faire un premier bilan après ces quelques mois de vie à Douala. Vous faire part, chers proches ou chers inconnus, de nos impressions, de notre état d'esprit… Rien de bien prétentieux, juste l'envie de partager ces moments uniques et forts qui font partie des prémices d'une installation en terre inconnue. Sommes-nous heureux de réaliser le vieux rêve de Raphaël d'habiter en Afrique ? Et bien OUI ! Mais attention, je répondrai en toute franchise qu'il y a des jours joyeux et des jours de spleen, de vide.

 

 

Il y a d'abord eu la phase d'euphorie des premières semaines avec une folle envie de découvrir notre nouvel environnement. Tout m'apparaissait génial : les bananes plantains, l'ananas, les avocats à tomber par terre, les sourires « Email Diamant », les bouts de chou à croquer, les palmiers (Ah ! ces palmiers, je ne m'en lasse décidément pas !), les bords du fleuve WOURI malgré la laideur de la ville. Soyons honnêtes, si Bucarest a été dénaturée par le Communisme, Douala noyée dans ses bidonvilles est franchement repoussante. Au départ, tout me fascinait, tout me surprenait, en bien comme en mal. Inutile de vous décrire certaines scènes de la vie quotidienne qui feraient sûrement la trame d'un bon polar… Ce que l'on voit ou que l'on nous raconte est à la limite du supportable pour une petite nature comme moi. Mais, au fil des jours, je me crée instinctivement une carapace. Ainsi, ce qui me choquait les premières semaines, me choque moins à présent. Et puis, c'est ma façon de réagir, de rebondir, de rester sereine. Appelez ça comme vous voudrez, MOI ça m'arrange de positiver. Dans une ville comme Douala, aux antipodes de notre manière de vivre et surtout dépourvue d'évènements culturels, il est évidemment extrêmement aisé de tomber dans le cynisme et d'épuiser tous les synonymes de « morosité ». Alors, soit vous décidez de faire comme moi, en l'occurrence, de prendre le bon côté des choses, soit vous broyez du noir (c'est dingue toutes ces expressions avec Noir et Blanc !) et mieux vaut rentrer au bercail.

 

 

En ce qui nous concerne, autant pour Raphaël que pour moi-même, la vraie raison de notre mal être, si tant est-il que l'on puisse parler de la sorte, est liée au déménagement qui n'est toujours pas arrivé à bon port ! Au jour d'aujourd'hui, il semblerait que notre container soit à Lomé. Bon, me direz-vous, cela me permets de revoir ma géographie et de répertorier les villes et les pays. Notre container est donc…ça y est vous avez trouvé ?! Et bien oui, il s'agit bien du Togo ! Chouette ! Ca se rapproche. On peut peut-être espérer le réceptionner pour Noël… Récapitulons : nous avons déménagé de Roumanie le 28 juillet. Ensuite, notre container s'est trouvé bloqué 10 jours à Constanza en raison de la guerre en Géorgie. Puis il est parti à Malte et au Havre. Ensuite à Anvers pour mieux arriver à…Lomé ! J'espère qu'il arrivera quand même avant notre prochain grand départ !!! Donc voilà. Vous comprendrez qu'il y a des jours de cafards, des jours où l'on aimerait se sentir un peu plus chez soi, même si Monsieur Simon a décoré l'appartement selon nos goûts. Des jours où on en a assez de voir les enfants jouer avec 3 légos et 5 playmobils et demi (bah oui ! les petites pièces ça se perd !) sur le carrelage car les tapis sont dans le container. Et puis, à force d'écouter 4 malheureux CD en boucle sur une radio qui n'en reconnaît plus que 2 (!), on rêverait d'avoir le choix parmi les milliards de CD de mon DJ de mari et de les écouter sur une bonne chaîne hifi. Et puis, s'entourer de livres, de photos, déballer les déguisements, accrocher nos tableaux, retrouver le cable de l'appareil photo et vous en envoyer de nouvelles. Au contraire de Raphaël, j'use de plus de philosophie mais à sa décharge, il est à Douala sans ses affaires depuis la mi-juin… L'essentiel me direz-vous, c'est de rester unis et de s'épauler. Et bien, c'est ce que l'on fait.

 

 

Une chose est certaine : tout recommencer demande du temps. On ne reconstruit pas une vie du jour au lendemain. Et puis, comme le dit si bien Raphaël, quand on quitte un endroit, on le quitte (en principe) lorsque l'on est au summum. C'est-à-dire au moment où on a une vie bien établie : un boulot, des repères, des amis. Vous vivez normalement en oubliant combien il est difficile de se créer un cercle. Et puis, un beau jour vous retentez l'aventure et plouf, plus rien ! Vous n'existez plus en tant que tel. Au travail, vous devez prouver que VOUS valez le coup, à la maison VOUS devez rassurer votre moitié sur les bonnes raisons d'être là (!!!) et surtout vous devez vous efforcer de trouver des gens gentils (tant qu'à faire…) et leur donner de bonnes raisons d'être avec vous !!! L'expatriation, hormis la vie de nantis (chauffeur, nounou, cuisinière) à laquelle pensent tous ceux qui sont en Europe, c'est ça aussi : TOUT RECONSTRUIRE !

 

 

Je vous rassure quand même avant de vous laisser, tous les soirs on boit un bon verre (ou 2…) de rosé sur la terrasse ! Et oui, la saison chaude pointe son nez… Je vous embrasse tous pour nous 5. Vous nous manquez. Delphine.



16/10/2008
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