Expérience africaine

Expérience africaine

Les vieux colons - 30/04/09

Lorsque l'on pense à l'Afrique, des clichés défilent dans notre tête, tels les animaux de la savane, le désert, l'apartheid, les forêts tropicales, le sida, la famine (cf Kouchner et son sac de riz !), Kirikou (et Karaba la Sorcière), Yannick Noah, le djembé… et l'on entend bien évidemment Karen Blixen prononcer cette phrase culte du cinéma: « I had a farm in Africa… ». Souvenez-vous, c'était il y a 25 ans, Out Of Africa, Meryl Streep et Robert Redford nous plongeaient au cœur de l'Afrique coloniale dans une sublime histoire d'amour…

 

A tous ceux qui se figurent la période coloniale terminée, je me dois dès aujourd'hui de rétablir la vérité. Cela fait neuf mois désormais que je vis au Cameroun et tel le terme d'une gestation, il faut que j'accouche de cette réalité contemporaine et quotidienne. Mais où veut-elle en venir ?!  Vous dites-vous. Patience… J'y arrive et je m'en délecte par avance.

 

Alors, voilà, que vous le vouliez ou non, les colons sont toujours bel et bien là ! C'est un fait, une véritable pandémie en ce début de 21e siècle. Non, vous ne rêvez pas, et M-ô-A non plus, malheureusement… J'en ai pour preuve, l'attitude de toutes ces Blanches et Blancs qui s'égosillent chaque jour à la boulangerie pour spécifier aux divers vendeurs et vendeuses, debout derrière le comptoir, frais et dispos pour vous servir Mâdame, pour vous servir Môsieur, (et ce, jusqu'à tard le soir), que leur PAIN N'EST PAS FRAIS !!! En jetant naturellement les quelques pièces de monnaie nécessaires à l'achat d'une simple baguette… Les mêmes qui, escortés par leur chauffeur, demanderont, que dis-je, héleront leurs « bonnes » afin qu'elles les déchargent, au plus vite, de leurs victuailles, tout épuisés qu'ils sont d'avoir passé une heure au SPA ou en salle de gym… Les mêmes qui, une fois à l'aéroport international de Douala (Wahoo, la classe!) se feront porter leurs valises en cuir par des "boys", jusqu'à la salle d'attente VIP, ne prenant pas la peine de les remercier, tout occupés qu'ils sont à postillonner dans leur téléphone portable... Et ceux-là ne sont pas les pires ! Je vous ferai donc l'économie des diverses situations cocasses auxquelles j'assiste quotidiennement, afin de vous parler plus en détail des vrais colons !

 

En effet, si une médaille du « Colon par excellence » était décernée, ce serait, sans hésitation, à eux qu'elle reviendrait. Je vous sens pressés de découvrir ces hommes hors du commun, puisque vous l'aurez deviné, il s'agit une fois de plus de la gent masculine. Et si vous avez aimé mon Gainsbourg sans âge, vous allez adorer le vrai colon ! Lui, est plus jeune que Papi Serge, faisant partie d'une espèce en prolifération, que l'on pourrait dater à partir de 45 ans et plus, rejoignant ainsi la famille de Papi Serge à l'aube de la sénilité ! Physiquement, notre colon n'a rien d'extraordinaire. Là, encore les filles, le genre de type sur lequel nos yeux ne s'attardent pas. Quoique, c'est vrai, après réflexion, je dois dire qu'il est repérable, à ses cheveux grisonnants, sa moustache, ses lunettes et surtout, détail caractéristique, à son ventre proéminent. Vous avez raison, je vous l'accorde, rien qui ne fasse rêver. Et bien voilà, c'est exactement la même espèce en voie d'extinction en Europe qui trouve un succès incontesté sur le continent Africain. « L'amour rend aveugle » prend tout son sens littéral, ici. Et oui, au Cameroun, à Douala City, il y a donc pléthore de messieurs en manque d'amour, de grands perdants de Tournez Manège (Bouhhhhhh ! Ça me rappelle quelqu'un…) et d'inconditionnels de meetic.com. Certains vivent ici à l'année et d'autres sont en voyage d'affaires. Dans le deuxième cas, alors là, le spectacle est gratiné !

 

Si vous avez l'occasion de vous retrouver dans un restaurant ou en discothèque avec cette espèce-là, vous assisterez à une scène de film à petit budget. Enfin, quoique… même des films à petit budget auraient plus de succès… Bref, vous y verrez des messieurs ventripotents, accompagnés de jolies filles (on n'est jamais trop prudent !), leur baver des mots doux à l'oreille, à moins que ce ne soient des blagues bien salaces, leur tripoter les cuisses, les seins, enfin, tout ce qu'il y a de « tripotable ». Puis, vous les verrez rire à gorge déployée, tout en ripaillant avec leurs compagnons d'infortune (le ventre, ça s'entretient et l'amitié, aussi!), aller se déhancher sur la piste de danse au rythme de la musique africaine, en ne manquant pas de peloter ces dames, court vêtues. A l'heure de régler l'addition, vous les verrez se lever avec légèreté (l'amour, ça fait pousser des ailes !), rajeunis de 20 ans, heureux de sortir leurs liasses de billets pour les jeter sur la table telles des confettis. L'alliance à la main gauche rappelant une épouse restée de l'autre côté de la Méditerranée, ne gâchera nullement la soirée, bien au contraire : ça y mettra un petit peu de piment ! Et si vous avez la chance de quitter le restaurant en même temps qu'eux, vous verrez le vrai Colon, gagnant de la soirée partir avec les admiratrices de ses compagnons !!! Imaginez le sentiment de puissance, de jouissance de notre colon prêt à passer une nuit inoubliable et irréversible. En effet, après le récent passage du Pape, je doute fortement que ces demoiselles catholiques acceptent de mettre un préservatif, si toutefois Môsieur le Colon y avait pensé… Et l'on s'étonne que le sida se répande en Europe !!! Pensons désormais à nos pauvres colons éreintés par leur voyage d'affaires au Cameroun. « Choupinette, si tu savais, ces voyages, cette chaleur, c'est horrible, ça m'épuise ! Vivement la r'trait' ! ».

 

Si Lynda Lemay se trouve un jour en manque d'inspiration pour écrire ses chansons, il faudrait alors qu'elle songe à venir faire un tour à Douala ! Sur ce, je vous laisse méditer sur notre époque coloniale bien moins glamour qu'au temps d'Out Of Africa  

 

   

 

 



30/04/2009
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